Grégoire de Nysse : Sur son ordination

Dimanche 10 juillet 2005 — Dernier ajout vendredi 9 avril 2010

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Nous sommes en mai 381, à Constantinople. Un cortège majestueux, où l’on reconnaît nombre d’évêques, entre dans l’église des Saints-Apôtres. Ils chantent le psaume 146 à pleine voix : « Il est bon de fêter notre Dieu, il est beau de chanter sa louange ! Le Seigneur rebâtit Jérusalem, il rassemble les déportés d’Israël ». La voix du psalmiste résonne comme en écho aux événements qui viennent d’affecter la communauté chrétienne nicéenne. Depuis le baptême de l’empereur Théodose à Thessalonique et l’édit impérial appelant tous les peuples à adhérer à la foi de Damase de Rome et de Pierre d’Alexandrie, le camp nicéen sait qu’il n’a plus à craindre la puissance impériale. La paix est revenue dans l’Église. Grégoire de Nazianze est à la tête de l’Église de Constantinople depuis le 26 novembre 380, date à laquelle l’empereur lui donna autorité sur les lieux de culte de la capitale impériale. Toutefois, pour que cette nomination fût effective et régulière, il fallait encore que Grégoire fût officiellement investi par ses confrères évêques. La situation fut régularisée dès le début du concile. C’est en cette occasion qu’à l’invitation de Mélèce d’Antioche qui présidait cette assemblée -, Grégoire de Nysse prononça le discours Sur son ordination.

Ce sermon, encore appelé À Évagre, sur la divinité, semble pouvoir être daté de manière assez précise. Il est admis, aujourd’hui, qu’il fut prononcé au concile de Constantinople de 381, vraisemblablement lors de l’installation de Grégoire de Nazianze comme évêque de la ville, c’est-à-dire avant le 31 mai de la même année. Grégoire de Nysse y fait part de sa tristesse après l’échec des négociations avec les pneumatomaques et fait allusion au départ de leur délégation. Il veut cependant se réjouir de la venue prochaine des « envoyés de l’Égypte », c’est-à-dire des évêques dépêchés au concile par Timothée d’Alexandrie, que Grégoire savait favorables à la foi trinitaire.

Plan

Il n’est guère aisé d’établir le plan de ce discours. J’en propose, au moins à titre provisoire, l’organisation suivante :

Préambule (§ 1 à § 3, p. 331-332)

a. Moïse atteste la divinité de l’Esprit (§ 4 à § 5, p. 333-334)

  • Le talent de Béséléêl vient de l’Esprit divin
  • L’appellation de divin n’atteste pas l’infériorité de l’Esprit mais sa divinité
  • Si l’Esprit est divin, il partage la nature du Père et du Fils sous peine de polythéisme.

b. Les discours d’aujourd’hui ne sont pas persuasifs (§ 6, p. 334-335)

  • Pourquoi les discours actuels ne conduisent-ils pas à la conversion ?
  • Parce que le lien de l’amour est dénoué.
  • Parce que la paix a été ôtée du trésor de l’Église.

c. La rupture pneumatomaque (§ 7 à § 8, p. 335-337)

  • Le départ du fils cadet
  • L’espérance de son retour
  • La tiédeur pneumatomaque rend tout retour illusoire

b’. D’où vient la force persuasive des apôtres (§ 9, p. 337-338)

  • On peut être tenté de l’attribuer aux miracles.
  • Mais les moines opèrent des miracles plus grands encore aujourd’hui
  • Pourquoi dès lors le nombre des sauvés n’augmente-t-il pas ?

c’. Le malheur pneumatomaque (§ 10, p. 338-339)

  • La joie de la moisson ne gomme pas le malheur de la rupture
  • Le Seigneur ne se mesure pas, donc pas non plus le Fils et l’Esprit

a’. Le Seigneur désaltère, bienheureux ceux qui ont soif (§ 11-12, p. 340-341)

  • Parabole du marcheur désaltéré qui rencontre une source
  • Le Saint Esprit est la source des biens célestes

Épilogue (§ 12, p. 341)

Le corps du discours de Grégoire de Nysse part d’une péricope biblique tirée de l’Exode où l’Esprit divin est dit source d’inspiration de Bézéléêl, pour aboutir à une lecture très personnelle de la béatitude de Matthieu, Bienheureux ceux qui ont soif, non pas de la justice dans le cas qui nous intéresse, mais du Seigneur. Entre ces deux piliers scripturaires qui sont chacun introduits par le verbe grec akouein, l’orateur développe deux thèmes qui s’entrecroisent tout en progressant dans la réflexion qui leur est propre : le premier est une méditation sur le caractère peu persuasif des proclamations épiscopales du quatrième siècle, le second réagit au départ de la délégation pneumatomaque suite à la rupture des négociations entreprises avec eux au tout début du concile de Constantinople (381).

Traduction : Luc Fritz

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