Théodore de Mopsueste : Explication du symbole de foi (I)

Première homélie catéchétique
Mercredi 11 juin 2008 — Dernier ajout mercredi 28 avril 2010

Dans la même rubrique…

Mots-clés

Articles liés

Les Homélies catéchétiques de Théodore de Mopsueste furent découvertes en 1932 dans un manuscrit syriaque. Elles sont au nombre de seize. Les dix premières commentent la profession de foi, les autres expliquent le Notre Père, la liturgie baptismale et l’eucharistie. L’homélie présente inaugure l’explication du Symbole de la foi.

Homélie 1. Grandeur des mystères proposés par le retour des solennités pascales (§ 1-2) ; nouvelle alliance conclue par Dieu avec le genre humain, inaugurée par le Christ ; son aboutissement (§ 3-4), entrevu par la foi (§ 5), sans cesse compromis par notre faiblesse originelle (§ 6). Ce qu’est la profession de foi ; ses conséquences (§ 7). Je crois : notion de la foi (§ 8-9) ; l’Église gardienne authentique de la foi (§ 10), à l’exclusion du judaïsme et de l’hérésie (§ 11) ; hors la loi règne l’erreur (§ 12). En un seul Dieu, le Père tout-puissant : réfutation du polythéisme confirmée par l’accord des deux testaments (§ 13-16).

En la vertu de Notre-Seigneur Jésus-Christ, nous commençons à écrire l’explication du symbole de la foi des trois cent dix-huit (Pères du concile de Nicée) que fit Mar Théodore l’interprète.

Première homélie

1. Quel verbe serait égal ou quelle pensée serait proportionnée à la grandeur de ces sujets qui nous sont proposés ? Ou quelle langue suffirait à enseigner ces mystères ? Il est difficile, en effet, à notre langue, d’exposer exactement ce qui regarde même les natures créées, parce qu’elles aussi sont formées avec une grande sagesse par leur auteur. Mais ce qui surpasse notre nature - ainsi est, en effet, ce dont nous voulons parler -, comment (cela) ne surpasserait-il pas toutes les pensées humaines ? Et nécessairement triomphe-t-il de nos paroles. Le bienheureux Paul en est témoin quand il dit : « L’œil n’a pas vu, ni l’oreille entendu, et il n’est pas monté au cœur de l’homme ce que Dieu prépare à ceux qui l’aiment (1 Co 2, 9).

2. Ce sont donc ces merveilles que veut dire notre discours ; et c’est à jouir de ces mystères que nous sommes conviés, parce que le temps même de la grande fête de la sainte Pâque requiert de nous cet enseignement. Si, en effet, Dieu eût voulu que ces biens célestes nous fussent inconnus, évidemment nous ne pourrions pas non plus en parler. Comment, en effet, pourrait-on parler de choses inconnues ? Mais ayant voulu depuis le premier moment et dès avant la formation du monde (Jn 17, 24) faire par l’ « économie » de Notre-Seigneur Jésus-Christ, paraître la sagesse cachée en lui, (Dieu) nous révéla les secrets mystères et la grandeur de ces biens et il en donna la connaissance aux hommes par l’Esprit Saint. Mais Dieu, dit-il, nous révéla par son Esprit (1 Co 2, 10), et nous montra les glorieux mystères ineffables accomplis par la vertu de l’Esprit-Saint ; (mystères) au moyen desquels nous sommes capables, par la foi, de nous élever aux biens à venir. Aussi est-ce donc avec confiance, selon la grâce de Dieu qui nous fut donnée, que nous avons l’intention de parler de ces (mystères) ineffables et fort au-dessus de nous ; parce que le temps même de la fête nous oblige à parler à ceux qui désirent ces redoutables mystères.

3. C’est maintenant pour moi le moment de dire : Chantez au Seigneur une louange nouvelle, car il a fait des merveilles (Ps 97, 1). C’est une louange nouvelle, en effet, qu’exigent les choses nouvelles, car c’est l’alliance nouvelle qui sera le sujet de notre discours ; celle que (Dieu) conclut avec le genre humain par l’économie de Notre Seigneur Jésus-Christ, abolissant toutes les choses anciennes et, à leur place, en montrant de nouvelles. Car tout ce qui est dans le Christ, dit-il, est une créature nouvelle, l’ancien est passé et tout est renouvelé (2 Co 5, 17). Évanouies la mort et la corruption, finies les passions et la mutabilité. (Voici) qu’apparaît la vie de la création nouvelle, et c’est à elle que nous tous nous attendons de parvenir par la résurrection d’entre les morts : nouveaux au lieu de vieux, incorruptibles et immortels au lieu de mortels et corruptibles, (voilà) ce que, par la résurrection d’entre les morts, (Dieu) fera de nous ; voilà l’alliance nouvelle qu’il nous a donnée et qui convient à ceux qui sont renouvelés.Et pour cette alliance, nous recevons la connaissance de ces mystères, ayant dépouillé le vieil homme et revêtu le nouveau, qui se renouvelle à la ressemblance de son créateur ; là où il n’y a ni juif ni gentil, ni esclave ni homme libre, mais, en tout et en tous, est le Christ (Col 3, 9-11). Ceci se réalisera exactement dans le monde à venir, quand, devenus immortels et incorruptibles, nous regarderons le Christ seul, dont nous aurons le royaume en partage, nous étant enlevée toute distinction de judaïsme et de gentilité, de servitude ou de liberté, et tout le gendre de vie à la façon de ce monde-ci étant parfaitement aboli. Quelle distinction de judaïsme ou de gentilité, de servitude ou de liberté, trouvera-t-on, en effet, chez des gens qui auront une nature immortelle et incorruptible à la ressemblance de l’image du Christ, selon le témoignage du bienheureux Paul ?

4. Mais, puisqu’il nous fallait avoir une foi ferme en ces biens à venir - de peur que nous en doutions à cause de leur grandeur en le voyant fort étrangers et supérieurs à notre nature -, ces mystères redoutables ont été réalisés pour nous, afin qu’en eux, comme en des symboles et en figures, nous accédions à l’espérance à venir, et que, sans hésiter, nous ayons foi en ces biens à venir, persévérant en une conduite conforme au monde nouveau et, autant que possible, ordonnant notre vie en ce monde selon qu’il est dit : notre service à nous est dans les cieux (Phi 3, 20), et notre demeure est (œuvre) de Dieu et nous avons une maison dans les cieux qui n’est pas faite de mains (d’homme) (2 Co 5, 1). Nous avons donc été inscrits dès à présent, grâce à ces mystères ineffables, pour cette glorification redoutable du monde à venir. Même si nous sommes encore sur terre, nous sommes autant que possible fixés en des moeurs célestes, pleins de mépris pour ce qui se voit et de désir pour ce qui est à venir. Ceux donc qui vont s’approcher de ces mystères redoutables, la grâce de Dieu maintenant les a appelés : ils vont s’approcher de biens non pas médiocres et communs, mais devenir complètement autres et acquérir une grande variété de vertus par le don de la grâce divine qu’ils vont recevoir. Ils vont devenir, en effet, immortels au lieu de mortels, incorruptibles au lieu de corruptibles ; impassibles, au lieu de passibles ; immuables au lieu de changeants ; au lieu d’esclaves, libres ; au lieu d’ennemis, amis ; d’étrangers (ils deviendront) fils et ne seront plus estimés de la part d’Adam mais du Christ ; et ce ne sera plus Adam qu’ils appelleront leur tête, mais le Christ qui les as renouvelés. Ils ne cultiveront plus une terre qui produit des ronces et des épines, mais ils habiteront le ciel, éloigné et étranger à toute tristesse et gémissement. Ce n’est plus la mort qui régnera sur eux, mais eux-mêmes régneront en la vie nouvelle, n’étant plus esclaves du péché, mais servant la justice, n’étant plus au service de Satan, mais demeurant avec le Christ en tout temps.

5. Adam, le père commun, a pris résidence au paradis, mais à cause de son ingratitude et de son péché, il fut chassé du paradis. Mais nous, qui sommes héritiers de sa nature et de son châtiment, la foi au Christ par la participation à ces mystères nous fait monter au ciel, comme il dit : « Si quelqu’un ne naît de l’eau et de l’Esprit, il ne peut entrer au royaume du ciel » (Jn 3, 5). Celui donc qui reçoit cette naissance spirituelle est sur l’heure inscrit au ciel et devient héritier et participant de ces biens à venir, comme dit aussi le bienheureux Paul. Donc, puisque tous ceux qui ont cru au Christ attendent de demeurer au ciel après la résurrection d’entre les morts - c’est au ciel, en effet, qu’est pour nous cette espérance, là où le Christ est entré pour nous, avant nous -, ils sont véritablement inscrits en cette demeure par le moyen de ces sacrements.

6. Nous avons donc grand besoin d’application et de beaucoup de diligence, de peur de déchoir de cette magnifique promesse et de subir comme Adam l’expulsion du paradis. Aussi, est-ce avec une profession (de foi) ferme, sans hésitation, que nous recevons cette participation admirable à ces mystères redoutables ; et il nous faut garder le souvenir de cette profession (de foi) et, avec beaucoup de soin, conserver ce que nous recevons. Quand, en effet, nous aurons reçu parfaitement ces biens célestes dont nous jouirons, et qu’effectivement nous les aurons acquis en strict héritage, nous ne pourrons plus en déchoir ; mais en ce monde-ci, - comme c’est en espérance que nous les recevons, en participant à ces mystères -, il est encore possible d’en déchoir, car nous avons une nature changeante. Il nous faut donc, avec beaucoup de crainte, faire diligence et être vigilants afin d’avoir fermement en nous l’espérance à venir.

7. Quelle est donc la profession (de foi) et quels sont les engagements par lesquels nous recevons participation aux mystères, dans l’espérance de ces biens célestes dont nous jouirons, sinon ceux qu’avec foi, au moment du baptême, nous professons devant le Christ Notre-Seigneur ? S’il était possible, à la seule audition, d’en comprendre (tout) le sens, nos paroles ne seraient pas nécessaires ; il suffirait, en effet, de les dire, pour que les auditeurs les comprennent.Comme beaucoup de sens y est caché, parce que nos pères bienheureux, par un don de Dieu, nous ont livré un trésor ineffable en de brèves paroles qui fussent faciles à apprendre et simples à retenir, nécessairement donc les étudier est requis de ceux qui vont prendre part à ces mystères, pour que leur soient manifestées la doctrine et la signification qui y sont cachées. Ayant appris la grandeur du don auquel ils vont accéder et compris la doctrine de leur profession et de leurs engagements, à cause desquels ils reçoivent un tel don, c’est avec vigilance qu’ils garderont en eux-mêmes la foi qui leur fut confiée.

8. Le principe donc de votre profession et de votre engagement, qu’il vous faudra, dans le mystère, soigneusement garder, est ceci : « Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant, auteur de toutes les (choses) visibles et les invisibles. » Nous allons donc, par la grâce de Notre-Seigneur, expliquer tous ces (termes) l’un après l’autre, car il est bon que vous en sachiez le sens à tous ; et il nous faut comprendre par là où, vous aussi, aurez votre profession (de foi) : « Je crois en un seul Dieu le Père tout-puissant. »
Telle est la base de la profession (de foi) religieuse, car c’est en croyant de cœur, qu’(on arrive) à la justice, et, en confessant de bouche, à la vie (Ro 10, 10). tel est le commencement de la ferme doctrine. Car, puisque la notion de religion est constituée par la profession (de foi) à des réalités invisibles et ineffables, elle a besoin de la foi qui fasse que la conscience voie ce qui est invisible. Le visible, en effet, nous le voyons de nos yeux, mais l’invisible c’est par la foi qu’il peut se voir, car la foi est la substance des réalités à venir et la démonstration de l’invisible (He 11, 1).

9. Cette foi amène substantiellement à la conscience ce qui, à strictement (parler), n’est pas encore. La résurrection, en effet, et le royaume du ciel et toute cette catastase à venir, qui n’est pas encore, par la foi nous admettons fermement qu’elle soit. La foi fait que l’âme voie et connaisse les réalités invisibles et ineffables. La nature divine, en effet - qui seule a le privilège d’être invisible et incorruptible et demeure en une lumière splendide, sans pareille, que nul parmi les hommes n’a vue, ni même n’est capable de voir (1 Tim 6, 16), par la foi nous méritons de la voir. De même donc qu’on peut voir les choses visibles par les yeux du corps, s’ils sont sains et aptes à voir et que rien ne les empêche de tout voir exactement - mais que, si quelque lésion survient, ces choses visibles leur deviennent toutes invisible, bien que vraiment elles soient visibles -, ainsi (en est-il) de ces choses invisibles et ineffables que le « discours religieux » nous fit connaître : tous, nous les voyons exactement, si saine est notre foi, mais elles sont invisibles à ceux dont la foi est malade. Et, puisque ce sont ces deux choses qui constituent le « discours religieux » - la profession (de foi) en Dieu, et que tout ce qui a été et sera provient de lui, pour nombreux et varié que ce soit - le bienheureux Paul nous montre que la foi est exigée par toutes deux. Celui, dit-il, qui s’approche de la religion doit croire qu’il y a un Dieu (He 11, 6) et encore : par sa parole furent faits les mondes, afin, dit-il, que le visible provienne de l’invisible (ib. 3). Par la première sentence, il enseigne que même la confession de Dieu ne peut subsister, si ce n’est dans un dessein religieux (et) par la foi seulement.Dans la suivante, il enseigne que ce qui provient de (Dieu), nous ne pouvons pas non plus le comprendre et reconnaître, à moins que par la foi nous en recevions connaissance. La foi donne à ceux qu’elle convainc, la perfection exacte en la vérité religieuse ; et ceux qui s’en éloignent s’enfoncent complètement dans l’erreur.

10. C’est l’église de Dieu, en effet, que Paul appela « colonne et fondement » (1 Tim 3, 15), parce qu’elle est saine en la foi et confirmée en la doctrine religieuse. Tous ceux, en effet, qui sont hors de la foi, païens et juifs avec le reste des hérétiques, étant privés de la foi, s’égarent fort de la vérité. Les païens, en effet, n’ayant pas la foi, ne purent comprendre que de rien Dieu puisse créer et faire toutes choses et le faire exister substantiellement, mais dans leur égarement, comme en des hallucinations, ils introduisirent auprès de Dieu une compagne que de (toute) éternité il aurait fait asseoir avec lui ; et en d’autres fables différentes ils déchurent de la vérité.

11. Quant aux Juifs, instruits du nom de Fils, ils ne comprirent pas, à cause de leur incrédulité, qui est le Fils véritable. C’est ainsi que les hérésies aussi, toutes étrangères à l’Église, se donnèrent elles-mêmes, vainement et de façon mensongère, le nom du Christ. Étant privés de la foi (les hérétiques) s’égarèrent ignorant la vérité, et - sans nommer à votre audition toutes les hérésies, comme Arius, Eunomius et tous ceux qui ont de l’affinité avec leur opinion -, ils souffrent du mal du judaïsme ; à cause de leur incrédulité, ils n’ont pas compris et admis qu’est de la nature divine le Fils, Dieu de Dieu, qui de (toute) éternité avec lui existe, et que tout ce qui se dit de la nature du Père se dit aussi de celle du Fils, la nature du Père ne souffrant nul dommage de ce qu’il y ait un Fils véritable, qui en lui soit capable de montrer son Père.

12. Ce peu de choses, parmi beaucoup, a été dit en admonition à ceux qui se sont égarés (loin) de la vérité ; qui, parce que privés de foi, se sont égarés. Nombreux, en effet, et varié est l’égarement où, par incrédulité, se sont égarés les hommes. Et de même que, quand la foi est loin, abonde l’erreur, ainsi quand elle est présente, la foi véritable procure la science. Par la foi, en effet, nous savons qu’il y a un Dieu, et que c’est lui l’auteur de tout et que de rien il créa toute chose ; et par elle nous savons que ceux mêmes qui sont morts et corrompus reviendront à la vie et subsisteront quand (le) voudra leur auteur. Par la foi, en effet, nous avons su que le Père a un fils, engendré de sa nature et qui est Dieu comme lui. Par la foi, nous avons admis au sujet de l’Esprit Saint qu’il est de la nature de Dieu le Père et que toujours il est avec le Père et le Fils. Par la foi, nous sommes certains et ne doutons pas de la prédication de l’économie du Christ qui se fit dans le monde. Ce fut donc à bon droit qu’au commencement de notre enseignement et dans le mystère de notre engagement, nos pères bienheureux posèrent pour nous, en guise de base, la foi ; et c’est par là que leur tradition nous oblige à commencer.

13. « Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant » : il n’y a rien là qui doive nous étonner en la manière dont nos pères saints ont enfermé et nous ont transmis en de brèves paroles tout l’enseignement religieux. Car ils ont pensé que les longs discours convenaient à d’autres moments et à d’autres personnes ; tandis que pour vous - qui depuis longtemps vous êtes séparés du monde et qui êtes venus avec une bonne volonté à la religion, et qui, avec beaucoup de soin et une conscience bonne, vous êtes préparés à recevoir les mystères divins -, en un moment redoutable, il vous faut de brèves paroles qui vous soient faciles à retenir par leur brièveté, en sorte que vous gardiez le souvenir de la profession que vous émettrez et de l’engagement que vous contacterez, en échange de ces mystères.Nécessairement s’y ajoutera pour vous l’étude, pour les comprendre exactement et vous mettre en garde contre toutes les paroles des ennemis de la religion, vous en tenant fermement à cet enseignement divin qui vous est confié.

14. « Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant » : considérez donc comment nos pères bienheureux, en la première sentence même de ferme profession de foi en un seul Dieu le Père, ont été attentifs à nous écarter de l’erreur du polythéisme et de l’impiété du judaïsme d’aujourd’hui ; (sentence) qui est parfaitement d’accord avec tout l’enseignement de l’Ancien Testament. Car les paroles du Nouveau Testament sur le Christ, étaient dans l’Ancien en prophétie ; mais la prophétie même existait comme en symbole, comme en signe, en sorte que par là les Juifs attendaient que le Messie leur apparût en homme, tandis qu’en la divinité du Fils Unique, qui est Dieu le Verbe, nul d’entre eux ne croyait. C’est, en effet, une doctrine parfaite que (nos pères) nous ont transmise, nous distinguant du paganisme, nous qui avons été initiés à la religion, (doctrine) qui éloigne beaucoup de l’erreur polythéiste ceux qui s’y soumettent, enseignant que ne sont ni nombreuses ni distinctes les natures de la divinité ; mais que c’est une nature unique que Dieu, existant de (toute) éternité et qui est cause de toute chose. Et celui-ci est Dieu et hors celui-ci rien d’autre n’est Dieu ; mais ce qui est de (toute) éternité et est cause de toute chose, c’est cela qui plaît à Dieu. Et qui n’est pas tel n’est pas Dieu par nature. Et qui est de (toute) éternité est cause de toute chose ; mais qui n’est pas de (toute) éternité ni n’est cause de toute chose, celui-là n’est pas Dieu, mais œuvre de Dieu, à qui seul il appartient de faire de rien toute chose.

15. C’est pourquoi il est dit : Le Seigneur ton Dieu est seul Seigneur (Dt 6, 4 ; Mc 12, 29), afin que nous apprenions qu’une est la nature de la divinité, à qui convient le nom de Seigneur et de Dieu. Il est dit encore : Les dieux qui ne firent point le ciel et la terre, qu’ils périssent de la terre et de sous le ciel (Jr 10, 11), afin que nous comprenions que celui qui n’est pas cause de toute chose n’est pas Dieu, mais que seul est Dieu celui qui est cause de tout. C’est pourquoi il fut dit à Moïse : C’est moi qui suis cause de tout, afin que nous apprenions que celui-ci en vérité existe, qui existe de (toute) éternité et existe en tout temps, et c’est lui qui est Dieu. Et qui est différent de ceci n’est pas de (toute) éternité, il n’existe pas en vérité, parce qu’il est fait et qu’il a été fait n’existant pas, quand voulut le faire celui qui existe de (toute) éternité, lui qui est Dieu. C’est pourquoi il est dit : C’est moi qui suis Dieu, le premier et le dernier, et il n’a pas été créé de Dieu avant moi, et après moi il n’y en aura pas (Is 44, 6), afin que nous comprenions que celui-ci est Dieu, qui est le premier et est de (toute) éternité ; et il n’est pas possible qu’un autre, créé, devienne Dieu, car la nature divine est trop sublime pour être faite.

16. Toutes ces paroles procurent l’enseignement religieux et la destruction de l’erreur païenne ; car, puisque pour les païens, les dieux sont nombreux et variés et certains d’entre eux sont jeunes et certains vieux, certains ont telle puissance et certains une autre, certains disparaissent et certains grandissent, parce que ce sont les natures nombreuses. A nous détacher de tout cela, c’est l’Ancien Testament qui nous l’a appris par les prophètes qui parlèrent en l’Esprit Saint - parce que tous les dieux des Gentils sont erreur (Ps 95, 5), et ce ne sont pas des dieux, parce que seul est Dieu celui qui de (toute) éternité existe et est cause de tout -, en disant : N’aie pas de dieu étranger, c’est-à-dire de Dieu nouveau, et n’adore pas de Dieu étranger (Ps 80, 10), car rien de ce qui est nouveau n’est Dieu. Ils sont nouveaux, est-il dit (Dt 32, 17) ; c’est donc qu’ils ont été faits. La nature divine, en effet, existe unique, existe de (toute) éternité et n’a besoin de nulle autre pour exister, mais elle-même est cause de tout ; et, à cause de cela, Dieu est unique et ce qui a été fait ne peut naturellement devenir Dieu, car cela a été fait par un autre. Mais toutes les créatures reconnaissent sincèrement leur auteur, qui est Dieu en vérité, de qui elles ont l’existence : et à cause de ceci, toujours elles sont dans l’obligation de rendre grâce, parce que de rien, par son bon vouloir, par l’autorité de sa puissance, il leur a donné d’exister.

17. Toute cette doctrine, grande en sa brièveté, nos pères bienheureux l’ont enfermée en cette parole : « Je crois en un seul Dieu. » En conséquence donc, nous admettons la foi en un seul dieu, selon la prédication des prophètes et l’enseignement de nos pères. Car, en vérité, une est la nature divine, qui de (toute) éternité existe et est cause de toute chose ; et non pas, selon l’erreur des païens, qu’il y ait de nombreux dieux différents. Mais puisqu’il faut vous présenter peu à peu l’enseignement de toute chose, afin que vous puissiez aussi vous souvenir de ce qui vous aura été dit - car cela aussi est nécessaire à tous ceux qui se disposent à prendre part aux mystères, à ceux qui s’attachent à ces paroles -, nous garderons pour d’autres jours l’accomplissement de notre promesse, avec le secours de la grâce de Dieu. Pour maintenant, contentons-nous de ce qui a été dit et faisons monter la louange au Père et au Fils et à l’Esprit Saint, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles.

Fin de la première homélie.

Sources :

Les Homélies catéchétiques de Théodore de Mopsueste, trad. Raymond Tonneau et Robert Devreesse, Biblioteca Apostolica Vaticana, Città del Vaticano, 1949, 1961, p. 3-29.

Avec l’aimable autorisation de A. M. Piazzoni, vice-préfet de la Biblioteca Apostolica Vaticana, pour une publication en ligne jusqu’au 31 décembre 2010.

Revenir en haut